Enfin je sors.
Le coeur plein bondissant de joie à l'idée de ce qui allait défiler devant mes pas.
La tête pleine de rancoeur pour ce que mes pas avaient traversé.
Le souffle enfin libéré de cet étouffant étau, je respire à pleins poumons la liberté.
Je me sens léger.
Je flotte au-dessus des hommes, écrasés par leur propre poids.
Ces hommes enfermés dans leur prison matérielle et spirituelle.

J'ai longtemps cherché un moyen de m'évader. En vain.
Mais j'ai réussi, je me suis enfui de ce monde fade et triste.
Enfin, je peux voler.
Enfin je suis libre.
Je me blottis dans les nuages, là où on me reprochait d'être si souvent.
Je visite le cosmos, là où nul ne me retrouvera.

Ma tête est légère, comme si les principes et lois parasites avaient disparus.
Enfin je vois le monde, les yeux et le coeur libres.

Et ce que je vois m'effraie :
Des oiseaux cloués au sol,
Des guépards paralysés,
Des penseurs enchaînés,
Des enfants emprisonnés.

Des destins entiers déviés vers des quêtes retentissantes de lâcheté.
Je vois ainsi tout ce gâchis, ce gâchis qui nous mènera vers notre perte à tous.

Tous ces gens effrayés de regarder le ciel de peur de se cogner,
Préférant regarder leurs pieds pour ne pas se perdre,
N'ont-ils pas tissé leur propre prison ?

Fuyant notre animalité,
Perdus dans notre humanité,
Nous n'oublions pas notre animosité.

Dieux ou animaux,
Nous sommes ce que nous enfermons.

Ces pensées m'assaillent de toutes parts.
Être immatériel, je me rappelle à moi-même.
Pourquoi ai-je fui ma destinée ?

J'ai eu si peur de moi que j'ai souhaité la mort.
Et si j'avais vécu ?
Si j'avais osé ?
Et si ?

Et si j'avais été assez fort ?

Aurais-je mieux fait d'essayer d'accomplir ma destinée avant de mourir ?

Cette question, poste-toi là.
Car même si la mort est loin,
La vie n'est que trop suffisante pour arpenter son propre chemin.